11/21/2011

Obéissance et sadisme, les mamelles de la nature humaine

 

 

Le sadisme et l’obéissance sont les deux principaux composants de la nature humaine et elles ont étés prouvées par l’expérience de Milgram qui concerne la soumission à l’obéissance et celle de Stanford qui concerne le comportement d’une personne dans une situation donnée.

L’expérience de Milgram

 

L’expérience de Milgram a été réalisé par le professeur Stanley Milgram pour étudier l’obéissance d’un individu à une autorité hiérarchique et le fait que les ordres donnés par cette autorité était en contradiction avec la morale du sujet. L’expérience mettait en scène 3 personnages :

  • L’élève
  • L’enseignant (le vrai sujet)
  • Le représentant de l’autorité

Au début, on disait à l’enseignant que l’expérience portait sur l’efficacité de la punition sur l’amélioration de la mémoire. En gros, si on punissait quelqu’un pour ses mauvaises réponses alors il s’efforcerait de donner les bonnes réponses. L’élève était attaché à une chaine électrique et l’enseignant était placé à quelques mètres séparé par une cloison. L’enseignant devait lire une liste de 30 mots avec des adjectifs correspondants. Par exemple, ciel=bleu, jour=frais, animal=féroce, etc. Par la suite, l’enseignant énonçait l’adjectif et l’élève devait dire le bon mot correspondant. A chaque mauvaise réponse, l’enseignant envoyait une décharge électrique de 15 volts et chaque nouvelle mauvaise réponse augmentaient les chocs électriques jusqu’à 450 volts.

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On doit préciser que les décharges électriques sont fictives et que l’élève n’est qu’un acteur qui simule la douleur. Au début, l’enseignant ne se pose pas la question et envoie la décharge. Mais à mesure qu’il entend les cris de douleur de l’élève, il commence à remettre en question la validité de l’ordre sans toutefois s’arrêter. Le principal objectif de l’expérience était de connaitre jusqu’à quel point, l’enseignant allait obéir à l’ordre et quelle serait la décharge maximal qu’il enverrait avant d’abandonner.

Les résultats parlent d’eux même puisque 65 % des sujets sont allés jusqu’à une décharge de 450 volts (en théorie, ce choc peut tuer la personne). Mais la moyenne s’arrêtait autour de 370 volts ce qui est déjà l’équivalent de la torture physique.

On obéit du moment qu’on n’est pas responsable

L’une des phases les plus intéressantes de l’expérience de Milgram est lorsque l’enseignant envoie une décharge de 300 volts. L’élève ne bouge plus et il ne répond plus. L’enseignant déclare que le sujet est peut-être mort, mais le représentant de l’autorité lui dit de continuer et qu’il prendra tout sur lui en cas de problèmes. Dans 85 % des cas, l’enseignant continue d’envoyer les décharges même s’il ignore si l’élève est encore en vie (A quoi sert d’électrocuter quelqu’un qui est mort ?).

L’expérience a démontrée qu’on est prêt à obéir à n’importe quel ordre du moment qu’on ne se sent pas responsable de ses actes. On pourra toujours dire : “ Mais je ne faisais que suivre les instructions “. Par la suite, on arrête l’expérience et on explique tout à l’enseignant en lui demandant de donner les raisons de son comportement. Dans le cas de la décharge supérieure à 300 volts tout en ignorant si la personne est vie ou non, 74 % des sujets ont répondus : “ Cela n’a aucune importance si le sujet est en vie ou non, on m’a demandé d’exécuter l’ordre et c’est tout. Est que le pilote d’un avion de combat se pose des questions sur la légitimité de sa mission lorsqu’il largue une bombe dans une ville remplie d’innocents ?”.

Le respect de l’autorité est la clé d’une obéissance aveugle

Le sujet enverra toujours des décharges du moment qu’il est surveillé par l’autorité. On a répété l’expérience dans laquelle le représentant était absent et on a noté que l’enseignant refusait d’envoyer des décharges à partir de 80 volts. L’agent qui exécute l’ordre doit sentir la surveillance de l’autorité sinon il ne sera pas efficace. De même, le respect de l’autorité est essentiel, car on payait le sujet environ 4 dollars pour une heure d’expérience ce qui est une somme insignifiante. On a demandé à un sujet s’il tenterait l’expérience avec un particulier qui serait l’autorité, mais qui payerai environ 1000 dollars.  98 % des personnes ont répondus par la négative. L’une des meilleures réponses est sans doute : “ L’argent n’a aucune importance, mais j’exécuterais toujours l’ordre d’une autorité que je respecte.” En gros, on peut tout faire si on estime que la cause est juste.

Cette expérience est célèbre puisqu’il donne des éléments de réponses pour expliquer les grands génocides de l’histoire. Comment peut-on massacrer des millions de personnes sous de faux prétextes ? Là encore, le respect de l’autorité et la légitimité de la cause sont des facteurs essentiels. Mais il faut également compartimenter les différents rôles pour que cela soit efficace. Une première personne sera chargé des arrestations, une seconde sera chargée du transport, une troisième va la garder dans une prison et enfin la dernière va peut-être la mettre dans une chambre à gaz. Le fait est que le dernier élément est la personne la plus cruelle et elle a été choisie en ce sens, mais les autres ne connaissent rien de l’objectif final. Est-ce que vous allez arrêter quelqu’un qui a conduit un simple train ?

Malgré que l’expérience de Milgram date de plusieurs décennies, sa validité n’a jamais été infirmée et l’un des meilleurs exemples est la folie islamophobe après les attentats du 11 septembre. L’autorité (le gouvernement américain) a utilisée une propagande (Arme de destruction massive) pour imposer une guerre en Irak qui lui assurerait sa survie dans le domaine énergétique. La peur provoquée par le terrorisme a servi pour valider les actes les plus barbares et tout le monde n’a rien dit et ils ont même hochés la tête. L’absurdité de l’obéissance aveugle est que le 11 septembre a fait 4500 victimes tandis qu’il y a eu environ 2,2 millions dans la guerre d’Irak et d’Afghanistan et on précise que toutes les victimes sont des civils. Dans un pays démocratique qui prône la tolérance et la liberté d’expression, de simples individus peuvent devenir des instruments de mort et de torture du moment qu’ils respectent les donneurs d’ordre. Stanley Milgram a publié un livre sur son expérience et il finit par cette citation :

la civilisation est caractérisée, avant tout, par la volonté de ne pas faire souffrir gratuitement nos semblables. Selon les termes de cette définition, ceux d'entre nous qui se soumettent aveuglément aux exigences de l'autorité ne peuvent prétendre au statut d'hommes civilisés. »

La duperie nécessaire pour une parfaite obéissance

Parmi les critiques sur l’expérience de Milgram, les principales concernent les duperies qui ont étés utilisées pour contraindre le sujet à accepter son rôle. Ainsi, on ne lui a pas dit que les décharges étaient factices et que l’élève était un acteur. Le tirage au sort était truqué puisque le sujet obtenait toujours le rôle du maitre. Enfin, le représentant de l’autorité était également dans la connivence. Cependant, le pourcentage de l’obéissance baisse si on introduit des variables telles que si l’enseignant pouvait voir l’élève ou que ce dernier était une femme. L’une des variables les plus remarquables est lorsqu’un second représentant de l’autorité entrait dans la pièce pour remettre en question le premier représentant. Dans ce cas, 92 % des sujets abandonnaient l’expérience, car il n’avait plus confiance sur la pertinence de l’autorité puisqu’il y avait des divergences.

L’expérience de Stanford

L’expérience de Stanford a été réalisée par le professeur Philip Zimbardo sur le comportement de l’individu s’il était confronté dans une situation dans lequel où il devait jouer un rôle. L’étude lui avait été commandée par le gouvernement américain pour comprendre les problèmes de la vie carcérale de l’époque. L’expérience mettait en scène deux groupes, les prisonniers et les gardiens. Chaque groupe était choisi au hasard et on s’assurait que chaque personne était dans de bonnes conditions physiques et psychologiques.

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Au début, on disait aux gardiens de faire tout ce qu’ils voulaient aux prisonniers sauf des violences physiques. Mais on ne disait rien aux prisonniers. Ces derniers étaient arrêtés par la police (qui était dans le coup) et les prisonniers passaient toutes les étapes d’une vraie arrestation (menotte, fouille corporelle, fichage, etc.) On leur bandait les yeux jusqu’à leur cellule. ils étaient enchainés au pieds et ils avait des numéros au lieu de leurs vrais noms. L’expérience devait durer 15 jours, mais elle a été abandonnée au bout de 6 jours, car tout le monde a perdu les pédales.

Dès les premières 24 heures, les gardiens et les prisonniers avaient parfaitement endossés leurs rôles. Les prisonniers tentèrent de se révolter ce qui força les gardiens à leur faire subir différents sévices. ils séparèrent les prisonniers en deux groupes en affirmant que certains étaient bien traités, car ils informaient les gardiens des agissements de certains prisonniers. Mais les gardiens sont sortis de leurs rôles, car ils étaient de plus en plus sadiques envers les prisonniers. Les humiliations verbales et  les harcèlements sexuels étaient systématiques. Certains prisonniers étaient obligés de nettoyer leurs excréments avec leurs mains.

John Wayne et le prisonnier 416, les leaders du groupe

Dans chaque groupe, on assista à l’émergence d’un leader qui imposa sa volonté aux autres membres. Pour les gardes, il y a eu quelqu’un qu’on a surnommé John Wayne, car c’était le plus sadique et le plus impitoyable. Le prisonnier avec le numéro 418 lança une grève de la faim comme une forme ultime de rébellion. Mais le plus intéressant est que les autres prisonniers refusèrent de le suivre tandis que les gardiens avaient acceptés John Wayne.

Un autre aspect est que même Philip Zimbardo a perdu le contrôle de l’expérience puisqu’il jouait le rôle du superviseur de la prison. Il a fallu l’intervention d’une  personne totalement étrangère à l’expérience pour que les différents protagonistes se rendent compte que c’était allé trop loin.

Nous sommes tous des sadiques en puissance

Le postulat de cette expérience est que tout le monde peut devenir un vrai sadique si on lui en donne la possibilité. La capacité de faire le mal fait partie intégrante de la nature humaine, notamment si la personne ne se sent pas responsable de ses actes. Les gardiens estimaient qu’ils avaient tous les droits puisqu’ils étaient les représentants du système. La similarité avec l’expérience de Milgram est flagrante puisque tout se base sur le respect d’une autorité supérieure.

On s’est souvenu immédiatement de l’expérience de Stanford lors du scandale de la prison d’Abu Graib en Irak. La plupart ont critiqué la manière dont le gouvernement avait géré l’affaire puisque seuls les instruments ont étés reconnus coupables alors que l’expérience de Stanford montre que c’est la hiérarchie qui convainc une personne de devenir un sadique.

Cette expérience montre également qu’il faut se méfier des donneurs de leçons et de ceux qui émettent des jugements sur les autres, car on risquerait de faire la même chose si on était à la place du gardien. Le sujet est toujours le vrai coupable, car il pense que l’obéissance aveugle est un gage de bonne foi pour vivre dans la société. On n’hésite pas à commettre les pires actes du moment qu’on est bien considéré par nos semblables.